J'aime la suave délicatesse de ses fleurs qui embaument les soirées du début de l'été.
C'est peut-être pour cela que je choisis de lire le roman de Serge Moati,
(paru en 2003),
au titre évocateur :"Villa Jasmin".
Je ne sais pas ce qui m'attend !
J'imagine la vie paisible d'une famille dans un décor idyllique, ou quelque passion secrète fleurissant à l'ombre d'orangers et de citronniers parfumant un petit coin de Tunisie...
Je me trompe lourdement.
Ce roman foisonnant est ...un bonbon au poivre.
Le style de l'auteur, d'une grande fluidité, nous fait certes partager l'insouciance et la douceur de vivre sous des cieux favorables :on perçoit littéralement les senteurs capiteuses, enivrantes de Tunis, à une époque "bénite",
où il fait encore bon vivre.
Brutalement, tout va changer.
On est embarqué dans la spirale infernale de l'Histoire, dans ce qu'elle a de plus sombre, de plus tragique.
On est transporté au coeur des événements qui vont broyer la France, l'Europe, et bien sûr, la Tunisie.
Des odeurs les plus caressantes associées à la douceur de l'enfance, on va passer aux relents pestilentiels de la collaboration et de la chasse aux Juifs.
On se trouve face à une galerie de personnages peu reluisants, avides de pouvoir, ou de vengeance.
On partage les heures noires de la vie à Tunis sous la botte allemande et
des franco-nazis.
Individus peu glorieux qui ne reculent devant rien pour satisfaire leur soif de domination.
Le père de Serge Moati n'échappera pas au cataclysme.
L'originalité de ce roman réside pour beaucoup dans le parti-pris qu'a choisi le narrateur.
Son va-et-vient permanent entre les différents lieux et les différentes époques met en présence ceux qu'il a aimés et ceux qui ont tout brisé.
Les face- à -face retrospectifs des différents protagonistes soulignent les responsabilités de chacun et ravivent chez le lecteur le souvenir de ce qui devint une des plus grande barbarie du siècle dernier.
"Villa Jasmin" est un roman empreint d'une douloureuse nostalgie.
C'est un hommage de l'auteur à ses parents chéris, bien sûr, mais c'est surtout un témoignage historique d'une poignante réalité.
Serge Moati, profondément humain, trouve le chemin de notre sensibilité,
et nous bouleverse.
Plus jamais, je ne regarderai mon jasmin comme avant.
Commentaires
1. christineb le 19-02-2012 à 17:37:09
Sapristi, ton jasmin est déjà en fleurs? Ton jardin bénificie-t-il d'un micro-climat? Tu me donnes envie de lire "Villa jasmin" mais j'attendrai que le mien embaume... D'ici là courage, tu as encore une semaine à tenir avant de retrouver un peu de temps!